Illustration : Zdenĕk Sklenář
Ah que coucou !
Aujourd’hui je vous propose de vous remémorer le mythe de Persée narré par Eduard Petiška.
Un jour, un oracle prédit au roi Acrisios qu’il serait tué par son propre petit-fils. Craignant pour sa vie, le roi essaya d’imaginer le moyen d’éviter ce tragique destin. Il rassembla tous ses esclaves, leur ordonna de creuser une cave sous le palais et de la clore par une porte de fer.
Puis il y emmena sa fille Danaé et l’y enferma soigneusement. Il lui fit porter de la nourriture mais ne la laissa pas sortir, de crainte que ne s’accomplisse la terrible prédiction.
Les gémissements et les cris de la prisonnière parvinrent aux oreilles du roi des dieux, Zeus, qui prit pitié de la jeune fille solitaire et descendit dans la cave sous forme d’une pluie d’or. Il illumina l’obscurité et tomba amoureux de la belle qui, peu de temps après, mit au monde un garçon auquel on donna le nom de Persée.
Un soir, le roi se promenait dans son parc. Soudain, il entendit les pleurs d’un enfant. Il crut d’abord que c’était le vent dans les arbres, mais les cris provenaient de la terre.
Effrayé et surpris, Acrisios courut vers la porte de fer de la cave et l’ouvrit. Danaé se jeta à son cou, le suppliant d’épargner la vie de son fils et la sienne. Mais le roi avait bien trop peur de la mort et il ignorait la compassion. Aussi la repoussa-t-il et rentra-t-il en hâte au palais.
Il donna l’ordre à ses gardes de mettre sa fille et son petit-fils dans une grande caisse, de la clouer et de la jeter à la mer.
Avant la tombée de la nuit, les vagues jouaient déjà avec la caisse où la malheureuse étreignait son enfant. A travers une fente, elle aperçut la mer démontée et l’écume qui ornait la crête des vagues.
Puis ce fut l’obscurité. La caisse était toujours ballotée sur les eaux sans fin, à la merci des tourbillons et du vent qui la poussaient vers une côte inconnue. Le lendemain, une île apparut à l’horizon. La caisse fut rejetée sur sa côte.
Des pêcheurs préparaient leurs filets sur la plage lorsqu’ils virent cet étrange objet qui flottait. Ils montèrent dans leurs bateaux et ramèrent à sa rencontre pour le haler sur le sable.
Curieux de savoir quel trésor était caché dedans, ils se dépêchèrent d’ouvrir le couvercle. Quelle ne fut pas leur surprise au spectacle qui s’offrit à leurs yeux : de la caisse sortait une charmante jeune femme portant dans ses bras un petit garçon endormi.
Tremblante et pâle, Danaé remercia ses sauveteurs et leur raconta son aventure.
Ayant exprimé leur étonnement, les sympathiques pêcheurs offrirent de la nourriture aux rescapés, et lorsque ceux-ci eurent repris un peu de forces, leur doyen les emmena jusqu’à la cité voisine, chez le roi de l’île.
Le souverain offrit l’hospitalité à la princesse étrangère et à son fils. Depuis ce jour, ils vécurent dans le palais et ne manquèrent de rien.
Après quelque temps, le roi épousa la princesse et s’offrit à élever Persée comme son propre fils.
Les vagues se succédaient dans la mer et les années se succédaient au royaume insulaire. Il y avait longtemps que le garçon avait cessé de jouer sur la prairie. Maintenant il luttait avec les autres jeunes gens dans les stades ; il montait à cheval et savait manier la lance.
Le roi, craignant pour son trône, surveillait avec ennui ce déploiement de force.
« Il serait bon », pensa-t-il, « si Persée allait de par le monde ». Aussi se mit-il à lui raconter des histoires de dragons, de géants et d’exploits héroïques. Persée l’écouta avidement.
« Il y a eu de fameux héros », raconta un jour le souverain, « mais aucun n’a eu le courage de ramener la tête de Méduse ».
« Et qui est cette Méduse ? » demanda le jeune homme.
« Bien loin, à l’Ouest », répondit son beau-père, « là où commence la nuit éternelle, vivent trois sœurs : les Gorgones. Elles sont monstrueuses : elles ont des ailes et à la place de la chevelure elles portent des serpents. Deux d’entre elles sont immortelles, la troisième est mortelle, on l’appelle Méduse. Quiconque regarde la figure hideuse et immobile de l’une des sœurs se transforme immédiatement en pierre. si je possédais la tête de Méduse, je pourrais la montrer à mes ennemis qui se changeraient en roches et je gagnerais ainsi toutes les batailles ».
Après cette conversation, Persée ne fit que penser aux monstres. Il avait envie d’accomplir l’exploit devant lequel tous avaient reculé. Le long voyage ne l’effrayait pas, et, si Méduse était mortelle, il croyait pouvoir la tuer de son bras fort armé d’un glaive acéré.
Au lieu de craindre le danger il songeait d’avance à sa victoire.
Quelques jours plus tard, ayant bien réfléchi, il annonça à sa mère :
« Je vais explorer le monde et rapporter la tête d’une des Gorgones ».
Danaé fondit en larmes à l’idée que son fils risquait de ne pas revenir. Mais le roi approuva la décision de Persée, en louant sa force et son courage. Au fond de son cœur, ce départ le soulageait.
Le jeune homme ne traîna pas. Impatient de tenter l’aventure, il se prépara promptement et se mit en route. Le soleil couchant lui indiquait la direction à prendre. Il traversa la mer et la terre, se frayant un chemin à travers d’immenses forêts pleines de bêtes et d’oiseaux sauvages. Il escalade des chaînes de montagnes et passa à gué des rivières.
Pendant très, très longtemps il marcha ainsi vers l’Ouest sans se lasser.
La déesse Pallas Athéna le suivait. Elle avait toujours protégé les voyageurs intrépides et le courage de Persée lui plaisait.
Un jour, elle lui apparut et dit :
« Tu es brave, mais la bravoure à elle seule ne te suffira pas. Tu dois apprendre ce qu’il faut faire pour rentrer chez toi sain et sauf. Je vais te donner des conseils. Il ne faut pas que tu jettes un seul regard sur les Gorgones, cependant il serait dur de combattre Méduse sans la voir. Aussi, je vais te donner un bouclier de métal. Il est poli comme un miroir et tu pourras la surveiller ainsi : ce reflet ne te fera aucun mal. Prends aussi cette courte épée pour lui couper la tête. Mais avant tout tu dois obtenir des nymphes des sandales ailées, le sac magique ainsi que le casque qui te rendra invisible. Viens ici, je vais te montrer le chemin qui va chez trois vieilles femmes. Ce sont les sœurs Gorgones et elles savent où vivent les nymphes ».
Persée remercia la déesse, prit le bouclier et l’épée et s’engagea sur le chemin qu’elle lui avait indiqué.
Ayant atteint une plaine caillouteuse et déserte, il aperçut soudain une cabane sordide. C’était la hutte des vieilles sœurs des Gorgones. Avant d’arriver à la porte le jeune homme les entendait déjà se quereller.
A elles trois, elles ne possédaient qu’une dent et un œil, et elles ne parvenaient jamais à décider qui y avait droit. Dès que l’une avait emprunté l’œil et se mettait à regarder autour d’elle, la seconde se jetait sur elle pour voir aussi. A peine celle-ci s’était-elle emparée de l’œil que la troisième le lui arrachait. Et la dent était l’objet des mêmes disputes.
« Qui est là ? » crièrent-elles.
Elles entendaient des pas mais ne pouvaient pas voir puisqu’aucune n’arrivait à attraper l’œil tant convoité.
« Qui que tu sois », hurla la première, « viens nous donner ton avis ».
« Dis-leur de me rendre mon œil », grinça la seconde.
« Surtout ne la crois pas », se lamenta la troisième : « c’est mon tour de l’avoir ».
Persée prit l’œil et la dent des mains des vieilles et leur dit :
« Pourquoi en effet ne serais-je pas votre arbitre ? Je vais garder les objets de vos querelles, ainsi vous serez tranquilles ».
Les femmes se mirent à se lamenter, en tendant les mains pour attraper le jeune homme. Mais comme elles étaient aveugle elle ne saisissaient que le vide.
Voyant qu’elles ne pourraient arriver à leurs fins, les vieilles se mirent à plaider :
« Rends-nous ce que tu nous a volé. Si tu le fais, nous exaucerons un de tes vœux ».
« Dites-moi », répondit Persée, « quel chemin il faut prendre pour aller chez les nymphes qui cachent les sandales ailées, le sac magique et le casque. Si vous me le montrez, je vous rendrai l’œil et la dent ».
Les vieilles essayèrent de le dissuader :
« Demande quelque chose d’autre ! »
Mais comme le jeune homme insistait, elles eurent peur qu’il s’en aille et lui révélèrent en gémissant la cachette des nymphes.
Persée leur rendit l’œil et la dent et quitta ce pays désolé en suivant la route indiquée par les vieilles. Plus il s’éloignait, plus la campagne devenait charmante. D’abord apparaissaient çà et là des touffes d’herbe, bientôt le sol fut recouvert entièrement d’une verte prairie. Les arbres solitaires et tordus cédaient la place aux bosquets embaumés, et, au milieu du taillis le plus touffu, les nymphes aux pieds nus dansaient dans une clairière.
Le jeune homme leur demanda les sandales, le casque et le sac qu’elles lui donnèrent sans hésiter.
Il attacha les cothurnes ailés, se couvrit la tête et jeta le sac sur son épaule. D’un coup de talon sur le sol il s’envola dans les airs. Chaque pas était comme un battement d’aile qui l’emportait rapidement. Rien ne vint interrompre son vol. Il se promena par-dessus les arbres et les montagnes. Les buissons embaumés se firent rares, puis disparurent, les vertes prairies s’évanouirent à l’horizon et Persée traversa à nouveau un pays désolé. De grands et de petits rochers jonchaient la terre ; certains ressemblaient à des animaux, d’autres à des hommes.
Tous avaient été des êtres vivants transformés en pierre pour avoir osé regarder les Gorgones. Même des oiseaux égarés n’avaient pu échapper à ce fatal destin, ils étaient devenus de petits cailloux noirs.
Le regard du jeune homme s’arracha à la contemplation de ce paysage inhospitalier et il scruta son bouclier. Il y vit le même triste spectacle, et bientôt il aperçut aussi les Gorgones.
Leurs horribles crânes ornés de serpents à la place des cheveux inspiraient la terreur, bien qu’elles-mêmes soient endormies auprès du lac.
« N’hésite pas », souffla la douce voix de Pallas Athéna : « celle du milieu est Méduse ».
Persée descendit jusqu’aux monstres endormis. Les reptiles, ayant flairé l’odeur d’un étranger, se mirent à siffler en se dressant contre le gêneur.
Après un regard au bouclier le jeune homme visa sa future victime, leva son épée acérée et d’un seul coup la décapita.
Un cheval ailé, Pégase, s’échappa de la gorge tranchée et disparut dans les nuages, à l’intense surprise du héros.
Il restait maintenant à emporter la tête. Elle était si grande que le jeune homme doutait de pouvoir la faire entrer dans son sac, même en sachant que celui-ci était magique. Mais le petit sac avala le fardeau comme un galet et ne changea pas de poids. Chargé de son butin, Persée frappa le sol de ses talons et s’envola.
Le battement des petites ailes éveilla les deux autres montres, les sœurs immortelles. Elles regardèrent autour d’elles et, apercevant leur sœur morte, elles se déchaînèrent. Elles s’élevèrent à leur tour dans les airs et tourbillonnèrent au-dessus du lac dans l’espoir de retrouver l’ennemi. Leurs serpents ondulaient et se dressaient de façon menaçante. Mais, grâce au casque, Persée était invisible, et c’est en vain qu’elles sillonnèrent le ciel : elles ne purent le retrouver. C’est ainsi que le héros leur échappa…
Impatient de surprendre sa mère et le roi, il vola longtemps. Porté par les sandales ailées, il allait bientôt atteindre son but. C’est alors qu’une terrible tempête s’empara de lui et l’emmena dans la direction opposée.
Il lutta contre le vent, mais celui-ci était déchaîné et le rejeta sur la côte d’Afrique. Epuisé, il se coucha sur l’herbe. Ses yeux le piquaient et tout son corps lui faisait mal. Il aurait bien aimé se reposer.
« Que fais-tu là ? » tonna une voix au-dessus de lui.
C’était le géant Atlas, debout au sommet d’une montagne, les jambes profondément enfoncées dans la terre.
« Laisse-moi rester ici », demanda le jeune homme fourbu, « je vais me reposer un peu, je partirai ensuite ».
« Tu peux t’en retourner d’où tu viens », grogna Atlas en l’examinant avec méfiance. « Peut-être es-tu venu chercher les pommes d’or, qui sait ? Va-t-en immédiatement ».
Persée se fâcha et répondit :
« Je vais te récompenser de ta bonté ! » Et, détournant le visage, il sortit de son sac la tête de Méduse.
A cette horrible vue le géant se transforma en un énorme rocher et sa barbe ainsi que ses cheveux devinrent des bois et des taillis. La montagne se mit à grandir jusqu’à ce qu’elle supporte le ciel sur sa crête. De nos jours, elle s’élève encore en Afrique et s’appelle Atlas.
Le héros referma son sac, se coucha et dormit d’un sommeil lourd jusqu’à ce que les rayons d’un soleil brûlant l’éveillent. Il n’y avait pas la moindre brise et Persée avait hâte de rejoindre sa mère. Il reprit son vol. Tandis qu’il voyageait ainsi dans les airs, des gouttes de sang tombèrent dans son sac. Dès qu’elles touchaient le sol, elles se transformaient en serpents venimeux qui, depuis cette époque, prolifèrent en Afrique.
Il avait déjà parcouru un long chemin lorsqu’il vit sur la terre une foule d’hommes qui couraient. Tous quittaient précipitamment le rivage comme s’ils avaient fui un raz de marée. Persée descendit, se mêla à la foule et demanda ce qui se passait.
« Le malheur a frappé notre pays », répondirent les gens heureux d’épancher leur cœur. « Notre reine Cassiopée s’est vantée d’être plus belle que toutes les nymphes de la mer. Aussi Poséidon a-t-il imaginé une punition pour tout le royaume. Chaque jour, un horrible monstre sort des eaux, détruit nos troupeaux et avale quelques personnes. La princesse Andromède elle-même n’est pas épargnée, c’est aujourd’hui son tour d’être sacrifiée. Elle vient d’être emmenée sur le rocher, nous l’avons accompagnée, mais maintenant nous nous dépêchons de fuir pour ne pas la voir périr. Bientôt l’affreuse bête va sortir des vagues ».
A cette nouvelle Persée se précipita vers la côte et s’envola au-dessus de la mer. La jeune fille était enchaînée aux récifs sous les regards de ses parents qui ne pouvaient quitter leur enfant bien-aimée.
Soudain l’océan vibra et se mit à bouillir. Un ignoble animal sortit du fond de la mer et, écartant les vagues, montra son corps aux écailles visqueuses. Andromède poussa un cri tandis que ses parents désespérés se mettaient à se lamenter sur la plage. Le monstre nagea vers le rocher où la jeune fille couvrait ses yeux terrifiés de ses mains tremblantes.
Alors le héros s’abattit sur la bête qui tentait de happer son ombre sur la mer. L’épée acérée transperça le serpent marin mais celui-ci sauta en l’air. Ce n’est que grâce aux sandales ailées que Persée parvint à lui échapper.
Il piqua l’animal encore et encore jusqu’à ce que l’eau soit rouge de son sang. Pourtant le monstre se secouait et continuait à combattre comme si les coups du héros le laissaient insensible.
Ses yeux ensanglantés surveillaient le moindre geste du jeune homme. Ce regard rappela à Persée la tête de Méduse. Il la sortit vivement du sac et la lui montra. L’effet fut immédiat : l’adversaire invincible fut changé en une pierre qui aussitôt coula à pic. Un tourbillon marqua l’endroit où la bête s’était abattue.
Andromède découvrit son visage, et son audacieux sauveur la compara en pensée à une étoile du matin qui se serait mise à briller après la tempête de la nuit. Il déposa son sac, son bouclier ainsi que ses armes et il courut délivrer la jeune fille dont la beauté le charmait.
Le roi et la reine s’approchèrent eux aussi pour remercier l’intrépide héros.
« Demande tout l’or que tu veux, prends de l’argent et des pierres précieuses », dit le souverain. « Je te donnerai tout ce que tu veux et j’y ajouterai des esclaves et des pur-sang ».
« Je préfère Andromède à toutes ces richesse », répondit Persée. « Si elle m’accepte pour époux, confie-la moi, je l’aimerai de tout mon cœur ».
La princesse consentit avec plaisir à cette union car elle était tombée amoureuse du jeune homme.
« Je suis heureux », dit le roi, « de marier ma fille à un homme aussi courageux. Tous les trois nous avions tantôt quitté le palais en larmes, et nous sommes maintenant quatre à nous réjouir ».
Le héros ramassa ses talismans et vit avec surprise que les plantes et les petites brindilles sur lesquelles avait reposé la tête de Méduse s’étaient transformées en pierres. Certaines, tachées par le sang, étaient devenues rouges. C’était du corail et les nymphes de la mer en cultivèrent sous l’eau, où d’épais buissons apparurent.
Persée retourna avec le roi, la reine et Andromède au palais où l’on préparait déjà une magnifique fête pour le mariage. Le souverain offrit à son peuple un grand festin : chaque passant put s’asseoir à une table couverte de nourriture, manger et boire à satiété.
Les notables de la ville festoyèrent au palais avec les membres de la famille royale. Les coupes d’argent tintaient gaiement, l’encens et les fleurs embaumaient toutes les pièces tandis que les lyres charmaient les oreilles.
Soudain, au milieu des rires et des chants retentirent des bruits d’armes et des cris. Une troupe de guerriers fit irruption dans la salle, accompagnant l’ancien fiancé d’Andromède, Phinée. Il l’avait demandée en mariage, mais devant le danger il l’avait abandonnée à la merci du monstre. Maintenant, muni d’une lance il provoquait Persée :
« Je suis venu te faire payer le rapt de la princesse. C’est moi qui suis son véritable fiancé ».
Et, de toute sa force, il jeta sa lance. Celle-ci manqua le héros et alla se planter dans un coussin. C’était le défi. Les hommes de Phinée déchaînés et sûrs de leur force acculèrent Persée contre un mur. Le jeune homme repoussa bravement avec son épée jusqu’à ce que l’arme devienne brûlante entre ses mains. Lorsqu’il vit qu’il ne lui restait plus d’autre issue, il s’écria :
« Que ceux qui sont mes amis se détournent de moi ! » et il sortit du sac la tête fatale. Tous les guerriers s’immobilisèrent, les bras figés.
Alors Persée se mit à la recherche de Phinée. Le lâche, qui cherchait à se cacher, implora sa pitié.
« Tu as été assez brave pour répandre le sang des autres et faire massacrer des hommes pacifiques », dit le héros, « un tel courage mérite une statue », continua-t-il en pressant contre l’infortuné couard la tête de Méduse. Phinée s’immobilisa à son tour ; mais, même lorsqu’il fut changé en pierre il garda son expression effrayée et resta peureusement blotti dans un coin.
Le jeune homme ne resta pas longtemps loin de sa patrie. Il s’ennuyait de sa mère. Bientôt il s’embarqua avec sa femme à bord d’un bateau à destination de l’île qu’il avait quittée en quête d’aventures.
En le revoyant, le roi son beau-père cacha difficilement sa déception : non seulement il était vivant mais il ramenait avec lui une jolie jeune femme.
« Tu n’as même pas rapporté la tête de Méduse ? » lui demanda-t-il d’un ton moqueur.
« Mais si, je l’ai », répondit le héros avec un sourire.
« Je savais bien que tu étais courageux », poursuivit le souverain, « mais je ne savais pas que tu étais un aussi intrépide menteur ! »
« Veux-tu la voir, ô roi ! » s’enquit Persée. « Je ne te le conseille pas, quiconque la regarde se transforme en pierre ».
« Les dieux savent quelle tête tu as tranchée », ricana son beau-père, « celle d’un bélier peut-être ? »
Ces propos mirent Persée en colère et, se détournant, il ouvrit son sac pour montrer la tête au roi. L’incrédule fut aussitôt changé en rocher.
Danaé, ayant appris par les serviteurs que son fils était revenu, vint à sa rencontre et se jeta dans ses bras.
Elle embrassa joyeusement son fils et la femme de celui-ci.
« Méfie-toi du roi », le prévint-elle, « il veut ta perte ».
« Il ne faut plus en avoir peur », répondit le jeune homme et il lui raconta ce qui s’était passé.
Persée devint roi. Il vécut longtemps sur l’île avec sa mère et son épouse bien-aimée.
Pourtant il n’échappa pas à la vieille prédiction. Un monarque voisin l’invita un jour à participer à des jeux de force et d’adresse qui avaient lieu dans son royaume. Le jeune roi accepta, et, pendant leur déroulement, lança un disque si maladroitement qu’il retomba au milieu du public et fracassa le crâne d’un vieillard. Celui-ci n’était autre que son propre grand-père, Acrisios, qui avait autrefois jeté à l’eau sa fille et son petit-fils. Effrayé par la prédiction, il avait secrètement quitté son palais et depuis il errait à travers le monde. Mais le Destin l’avait retrouvé et la prédiction s’était accomplie.
Frappé d’un profond chagrin, Persée l’enterra et retourna dans son royaume.
Il régna longtemps avec sagesse. Les dons magiques furent rendus à Pallas Athéna, mais il garda encore quelques années le sac renfermant la tête de Méduse qui le protégea efficacement contre ses ennemis.
Que nous enseigne ce mythe ? Et bien regardons cela ensemble vite fait – oui nous arrivons au maximum accepté par Centerblog dans un même billet ;)…
D’abord, quoi que puissent faire les Grecs anciens, qui étaient très superstitieux, du moment qu’un oracle a prédit quelque chose, cela arrivera forcément. On leur enseigne donc, là encore, à croire aux prédictions divines (un oracle prédit au roi Acrisos que son petit-fils allait le tuer et malgré tout ce qu’il a fait pour s’en protéger, il meurt des mains de son petit-fils).
Ensuite on nous enseigne qu’il ne faut pas faire aveuglément confiance et faire attention de ne pas être trompé par des personnes que nous pensons bienveillantes (l’épisode avec le mari de Dané qui a élevé Persée comme son propre fils et qui, d’un coup d’un seul, souhaite se débarrasser de lui car il croit que le dessein de Persée est de lui voler le trône).
Et le dernier point est que ce mythe vante le courage car une personne courageuse est toujours récompensée (Persée séduit la déesse Athéna, en retour il apprend comment vaincre les Gorgones ; il tranche la tête à Méduse, il libère Pégase, en récompense son trophée le protège de ses ennemis ; il sauve la princesse Andromède, il l’épouse).
Bisous,
@+
Sab
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire