Ah que coucou !
Qui ne connait pas ce mythe de Prométhée ? Et bien, pour vous le remettre en mémoire, le voici, traduit par Eduard Petiška et illustré par Zdenek Sklenár, tiré du livre Mythes et Légendes de la Grèce antique dont vous voyez la couverture en tête de ce billet.
Le ciel se mirait dans les eaux et les eaux étaient remplies de poissons. De grands vols d’oiseaux passaient dans le ciel et des troupeaux paissaient dans les prairies. Mais personne ne s’occupait des troupeaux, personne n’attrapait les poissons et personne n’écoutait le chant des oiseaux. Sur terre, il n’y avait pas d’homme.
Prométhée, descendant de la famille sacrée des Titans, errait tristement sur terre et cherchait en vain des êtres vivants marchant debout comme lui et dont le visage aurait été semblable au sien. Mais il voyait l’argile d’où surgissaient l’herbe, les plantes et les arbres ; il voyait aussi les fortes pluies tombant sur la terre. L’eau de pluie gardait la nature en vie, et là où elle ne tombait pas les arbres et les buissons mouraient, laissant place au désert.
Lorsque Prométhée découvrit la force de la terre et de l’eau, il mélangea de l’argile et de l’eau de pluie, moulant la forme du premier homme. Cette forme ressemblait à celle des dieux. Pallas Athéna, déesse de la sagesse et de l’esprit, insuffla une âme à la forme sans vie : la grise argile devint rose, un cœur se mit à battre en elle et les bras et les jambes, encore immobiles, se mirent à bouger. C’est ainsi que Prométhée envoya sur terre le premier homme.
Longtemps, les hommes ne surent que faire de leur âme, don de Pallas Athéna. Ils vivaient comme de petits enfants. Ils voyaient mais ne reconnaissaient pas, ils entendaient mais ne comprenaient pas, ils marchaient sur terre comme dans un rêve. Ils ne savaient ni cuire des briques, ni couper du bois, ni construire des maisons. Semblables à des fourmis, ils grouillaient sur la terre et sous la terre, dans les recoins sombres des grottes. Ils ne savaient même pas que l’été succédait au printemps et que l’automne suivait l’été.
Prométhée descendit alors parmi les hommes et leur apprit à élever des maisons, à lire, à écrire, à compter et à comprendre la nature. Il leur montra comment atteler des animaux à des charrettes pour ne pas avoir à porter sur leurs dos de lourds fardeaux. Il leur enseigna l’art de construire des bateaux, leur expliquant comment les voiles aidaient le rameur à la tâche. Il les conduisit dans les profondeurs de la terre, à la recherche des trésors cachés. Le dur travail des mineurs arracha aux entrailles du sol le fer, le cuivre, l’argent et l’or.
Avant cette époque, les hommes ne connaissaient pas la médecine, ils ne pouvaient pas discerner ce qui leur faisait du bien de ce qui leur faisait du mal ; aussi Prométhée leur montra comment préparer des onguent et des médicaments. Il enseigna tous les arts aux hommes stupéfaits et ils les apprirent tous avec avidité.
Les dieux, assemblés sur le mont sacré de l’Olympe, jetaient des regards soupçonneux sur cette génération d’hommes sur la terre qui, grâce à Prométhée, avaient appris le travail, les sciences et les arts. Zeus, dieu souverain, fronçait les sourcils chaque jour davantage. Il appela Prométhée et lui dit :
« Tu as appris aux hommes à travailler et à penser, mais tu ne leur as pas assez appris à vénérer les dieux, ni à leur offrir des sacrifices, ni à les adorer. Tu dois savoir que c’est que dépendent la fertilité du sol, la prospérité ou le malheur des hommes. Les dieux décident de leur destin. Moi-même, j’envoie ma foudre quand je le veux. Retourne chez les hommes, et dis-leur de nous offrir des sacrifices, sinon notre courroux s’abattra sur eux. »
« Les hommes vont offrir des sacrifices aux dieux », répondit alors Prométhée, « mais il faut que tu viennes toi-même, ô Zeus choisir ce qu’ils sacrifier ».
Prométhée tua un taureau, cacha la chair dans le cuir du taureau et disposa les entrailles par-dessus. Il fit un autre tas avec les os, mais les recouvrit avec la graisse de telle sorte qu’ils étaient invisibles. Le tas d’os recouvert de graisse était plus gros et plus appétissant. Dès que tout fut prêt, Zeus sentit l’odeur délicieuse du sacrifice préparé et descendit sur terre.
Prométhée vit Zeus et s’exclama :
« O grand Zeus, choisis la part que tu préfères. Celle que toi, roi des dieux, aura choisie sera celle que les mortels continueront à te sacrifier ».
Zeus comprit bien que Prométhée cherchait à le tromper. Pourtant il ne montra pas sa colère, mais choisit délibérément le tas luisant de graisse. Alors, tout souriant, Prométhée s’approcha, écarta la graisse : les os dénudés apparurent. Par contre, lorsqu’il ôta le cuir du taureau de l’autre tas, la chair fraîche apparut, dégageant son agréable odeur. Depuis ce jour, les hommes sacrifièrent aux dieux la graisse et les os et gardèrent la chair pour eux.
Mais Zeus ne laissa pas impuni cet acte effronté : il décida de priver les hommes du feu, et, si la meilleure part – la chair – leur était réservée, ils devaient dorénavant la manger crue.
Zeus ordonna immédiatement aux nuages d’éteindre tous les feux avec leur pluie. Quant au vent sauvage, il devait disperser la cendre chaude et l’éparpiller, dans la mer. Ainsi les hommes perdirent le feu, indispensable au travail et à la vie : ils ne pouvaient même plus cuire leur pain. Les forges furent abandonnées et les ateliers se vidèrent. Lorsque les journées étaient froides et qu’il gelait la nuit, les hommes ne trouvaient nulle part à se réchauffer.
Prométhée vit quel désastre s’était abattu sur eux ; il les prit en pitié et ne les abandonna pas. Sachant que dans le palais de Zeus brillait jour et nuit un feu étincelant, il rampa la nuit jusqu’en haut de l’Olympe vers le palais sacré du dieu suprême. Sans être vu, tout doucement, il prit un peu du feu qui brillait dans la cheminée de Zeus et le cacha dans un bâton creux. Puis, tout joyeux, il s’en retourna chez les hommes avec son précieux larcin.
Les flammes s’élevèrent à nouveau dans les maisons et les ateliers, et l’odeur de plats cuits et de viandes grillées monta dans les cieux, jusqu’aux narines des dieux. Zeus abaissa ses regards vers la terre et vit la fumée s’élevant des cheminées. Il fut pris de la terrible colère des dieux et immédiatement imagina un nouveau châtiment. Il fit venir Héphaïstos le dieu boiteux, artiste renommé qui vivait au pied d’un volcan fumant où il avait ses ateliers, et lui commanda la statue d’une femme très belle.
Héphaïstos obéit, et bientôt Zeus put contempler une beauté comme personne n’avait jamais pu rêver d’en voir une. La déesse Athéna donna à la jeune fille un voile superbe, un vêtement éblouissant de blancheur et une magnifique ceinture. La déesse de la beauté, Aphrodite, lui donna une grâce aérienne, et quant à Hermès, le messager des dieux, il lui offrit une parole éclatante et vive et une voix splendide. Puis ils mirent une couronne sur sa tête. Zeus lui donna pour nom Pandore – ce qui veut dire ornée de tous les dons – et lui confia une boîte en or. Enfin, Hermès emmena Pandore sur terre, chez le frère de Prométhée, Epiméthée.
Prométhée avait souvent prévenu son frère qu’il ne fallait accepter aucun présent des dieux, mais devant la beauté de Pandore, Epiméthée oublia toutes les recommandations et l’accueillit dans sa maison, elle et sa boîte en or. Curieux de voir ce que les dieux lui avaient envoyé dans cette boite, il demanda à Pandore d’en soulever le couvercle, ce qu’elle fit volontiers. La Maladie, la Souffrance, la Misère et la Détresse s’échappèrent alors de la boîte en sifflant, grognant et geignant. Elles s’élevèrent au-dessus de la maison et se répandirent partout dans le monde qui jusque là avait ignoré le mal. Pandore elle-même s’effraya et referma vite le couvercle. Tout ce qu’il y avait de mauvais s’était échappé de la boîte, et seul l’Espoir était resté dedans : la Maladie et la Détresse l’avaient étouffé tout au fond du coffret de façon que seule une toute petite partie puisse s’en échapper dans le monde.
La Pauvreté et le Mal envahirent les maisons, et la Mort vint sur leurs talons. La Souffrance et l’Inquiétude réveillèrent les hommes pendant leur sommeil et les mauvais rêves les étouffèrent. Seul l’Espoir n’était pas répandu, car il était resté presque enfermé dans la boîte de Pandore.
La colère de Zeus frappa aussi Prométhée. Le roi des dieux envoya Héphaïstos et ses aides pour attacher le rebelle avec les chaines les plus lourdes et les plus solides à un rocher élevé des montagnes du Caucase. Contraint à obéir, Héphaïstos attacha si bien Prométhée au rocher qu’il ne pouvait pas bouger.
Prométhée était suspendu entre ciel et terre juste au-dessus des abîmes où flottaient les brouillards, mais il ne s’humilia pas et n’implora pas la pitié de Zeus.
Lorsque ce dernier comprit que Prométhée ne lui demanderait pas pardon et supportait fièrement son destin, il envoya au Caucase un aigle gigantesque. Chaque jour, l’aigle devait arracher le foie de Prométhée et le manger. Pendant la nuit le foie repoussait et le lendemain l’aigle renouvelait son supplice. C’est ainsi que Prométhée fut condamné à souffrir pour toujours. Beaucoup d’années passèrent, mais il ne fléchit pas.
Après des siècles, pendant lesquels Prométhée subit la torture et la solitude, Héraclès, fils de Zeus, remarqua le héros enchaîné sur le Caucase. Il passait devant lui en allant cueillir les pommes d’or du jardin des Hespérides tandis que l’aigle arrivait pour prendre sa nourriture.
Héraclès posa sa massue, tendit son arc, visa, et d’un seul trait tua le monstrueux oiseau de proie. Puis il rompit les chaînes et rendit au captif sa liberté. Pour amadouer Zeus et accomplir sa peine, Prométhée dut porter un anneau de fer renfermant une pierre du Caucase. Il resta ainsi « enchaîné pour toujours », selon les vœux du dieu suprême.
Depuis ce temps, les hommes portent des anneaux ornés de pierres en mémoire de l’épreuve de Prométhée. Ils les portent encore aujourd’hui, bien qu’ils aient depuis longtemps oublié Prométhée, qui ne voulut pas se soumettre aux dieux et prit fidèlement parti pour les hommes.
Que nous enseigne ce mythe ?
Ce mythe sert d’enseignement religieux. Nous apprenons que seuls les dieux peuvent décider de l’avenir de l’homme. Il nous apprend que nous devons vénérer les dieux. Mais ne pouvons-nous ne tirer qu’un enseignement religieux ? Non parce qu’il nous apprend aussi à nous méfier de notre curiosité et de certains cadeaux émanant de personnes/entités en qui nous pouvons avoir confiance et qui ne sont, en fait, que des cadeaux empoisonnés qui font plus de mal que de bien malgré leur joli emballage… Bref, ce mythe nous enseigne la prudence et le respect de la volonté divine…
Bisous,
@+
Sab
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